vendredi 12 février 2010

La fameuse déception de l'Ipad (12/2/2010)

En ce temps là, après celle de la musique, puis de la téléphonie, Steve Jobs s'apprêtait à proposer au monde le 3ème volet de sa révolution numérique, à savoir celle de l'édition et de la presse. Le 27 janvier 2010, il présenta donc le produit qui devait incarner cela, une tablette à écran tactile dotée de facultés logicielles. L'Ipad.

Depuis, on a déjà quasiment tout lu sur le sujet, et la tonalité dominante est la déception: déception sur les aspects techniques du produit, pronostics pessimistes, moqueries sur le nom, constats d'échec signés en blanc, etc. Et si l'on en croit la news de CultofMac.com (reprise ici en français par l'excellent site Mac4ever.com), Jobs aurait carrément raté son lancement de l'Ipad: ayant décidé qu'Apple ne serait plus présente à la Macworld de février, il a préféré dévoiler son produit de manière confidentielle devant un public restreint de journalistes, se privant de l'enthousiasme des fans, ingrédient indispensable au lancement d'un nouveau produit

Personne n'est dans le tête de Jobs, par même Leander Kahney, auteur de la news et du livre Inside Steve's Brain. Alors une autre lecture est possible, et qui ne ressemble en rien à un ratage.

Jobs n'a rien raté du tout, et il se fiche de la Macworld. Avec l'Ipod, il a surpris tout le monde, surtout les maisons de disques tétanisées de trouille et occupées à diaboliser le piratage, alors qu'un nouveau moyen de distribution était apparu, et qu'il fallait le comprendre, se l'approprier et le monétiser. Dirigées par des gestionnaires et non par des visionnaires, elles n'ont pas cru en Apple. Aujourdhui, Apple est le premier marchand de musique au monde.

Avec l'Iphone, re-surprise, mais le temps de réaction chez les concurrents est moindre. Même si on attend encore les vrais challengers de l'Iphone, la compétition s'organise, et fleurissent de tous côtés AppStores en tous genres et écrans tactiles à qui mieux mieux.

A chaque tour de manège - la musique, puis la téléphonie - les autres apprennent d'Apple, et le hold-up devient de plus en plus difficile à exécuter, ou plutôt exige un tour de main plus délicat. L'enjeu est cette fois la presse et l'édition, domaines sur lesquels d'autres comme Amazon ou Google, nés de la nouvelle économie et non de l'ancienne, n'ont pas l'intention de se montrer aussi neuneus que l'ont été ces pauvres maisons de disques. Au 3ème hold-up annoncé, les autres ont appris à considérer Jobs et ses stratégies, il n'y a qu'à voir le nombre de tablette que sortent en ce moment les constructeurs: si Apple le fait, alors c'est qu'il faut le faire.

Jobs ne peut se permettre aucun contre-temps: il présente l'Ipad fin janvier, car cela lui permet de diffuser le SDK (Software Development Kit, ou Kit de Développement Logiciel) afin que les nombreux développeurs qui ont fait la gloire et la fortune de l'Appstore et de l'Iphone aient le temps d'adapter leurs programmes, et d'être prêts pour le jour de la sortie. Ce jour-là, l'Ipad sera disponible avec une quantité de programmes suffisamment conséquente pour rendre attractive l'offre appareil + applications.

Et voilà. En 1994, Jobs déclarait:
"J'ai toujours été attiré par les changements plus révolutionnaires. Je ne sais pas pourquoi. Parce qu'ils sont plus difficiles. Ils sont bien plus stressants d'un point de vue émotionnel. Et vous passez en général par une période durant laquelle tout le monde vous dit que vous avez complètement échoué".

Nous sommes précisément dans cette période, et la déception que l'on ne cesse d'évoquer ici ou là est tout à fait explicable, tout le monde parlant d'un objet que personne n'a eu entre les mains, et par conséquent personne n'a pu en faire l'expérience directe. Sauf pour les ingénieurs de chez Apple qui l'utilisent depuis six mois ou un an, l'Ipad n'existe pour l'instant dans le grand public qu'à l'état de fantasme imagé. Les développeurs ayant déjà goûté aux avantages de l'Iphone qui se sont mis au travail se passent également d'état d'âmes.

En attendant la sortie officielle de l'Ipad, Jobs s'offre encore deux mois de buzz gratos: comme dit l'adage, "qu'on parle de moi en bien ou en mal, peu importe pourvu que l'on parle de moi".

[MAJ] il semblerait un mois après que cette analyse ne soit pas complétement fausse.

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